AREA

AREA – Autour du rose enfer des animaux : expérimentations installatives et performatives d’une dramaturgie plurielle (Financement : FRQSC – 2014/2018)

Le projet de recherche-création avait comme objectif principal la création de nouveaux outils logiciels adaptés à la conception, à la production et à l’archivage d’œuvres scéniques complexes (voir e-theatre). Prenant appui sur l’œuvre de téléthéâtre cosmique de Claude Gauvreau, Le rose enfer des animaux (1958), le projet visait également à réaliser une installation performative permettant de mettre à l’épreuve diverses stratégies d’écriture plurielle où plusieurs lignes d’action évoluent dans l’espace scénique : une grande table autour de laquelle peuvent s’assoir huit convives-spectateurs jouant à leur insu les divers personnages-animaux de la pièce. Le projet s’est déroulé en trois étapes de travail. 

Même si nous savions au départ que le projet de « cartographier » et de mettre en mémoire la conception et l’écriture d’une œuvre plurielle relevait d’une grande complexité, le fait d’avoir choisi en particulier cette pièce de Gauvreau nous a placés devant une énorme montagne de possibilités. Assez étourdissant comme base de données à constituer! En terme de retombées, nous avons esquissé et expérimenté des bases solides pour la constitution d’un outil d’écriture qui pourra être développé dans des phases ultérieures en fonction de besoins du milieu culturel et même scientifique (intéressé à des stratégies de simulation d’actions complexes).

En ce qui concerne l’œuvre créative, les commentaires reçus lors des premières présentations nous ont fortement poussés à poursuivre le projet car la fascination était patente! Le collectif Dans ta tête formé d’anciens étudiants qui ont participé au projet a donc le mandat de produire les prochaines étapes menant à des présentations publiques dans un contexte professionnel. 

DRAMATURGIE

Résumé de la pièce

Le Rose enfer des animaux a été créé en 1958 et reste le premier texte québécois écrit pour l’écran, en tant que télé-théâtre, alors que le milieu télévisuel n’avait pas encore les moyens de réaliser un texte aussi surréel et éclaté. Il faut savoir qu’expliquer cette pièce reste très difficile dû, en partie, à son esprit exploréen et dadaïste, mais essayons quand même. Attention, ce résumé divulgâche la surprise finale. 

Huit personnages sont invités par Domitien D’Olmansay à un grand repas étrange, surréaliste, automatiste. Au cours de la soirée, chacun d’eux s’échange à plusieurs reprises avec leur forme animale ou d’obus. Pourtant, personne ne semble savoir qu’ils sont des animaux, mis à part l’hôte. Tous s’adonnent à des jeux, conversations et images plus déjantés les uns que les autres jusqu’au moment où un intrus fait irruption dans le repas et qu’il faut mettre à mort l’hôte de la soirée. Transformations, apparitions, disparitions, gastronomie et menu vivant sont définitivement au rendez-vous. Sujets politiques, religieux, artistiques et sexuels s’entremêlent tout au long de la pièce sans véritable fil conducteur tangible excepté peut-être celui de faire revivre une dernière fois l’automatisme dans toute sa splendeur et ses possibles.

Cette pièce présente des effets, des images et des répliques ardues à concrétiser fidèlement même aujourd’hui avec nos multiples moyens technologiques. Il s’agit d’un véritable défi pour tout créateur voulant s’y aventurer autant à cause de sa richesse débordante d’opportunités qu’à cause de son univers extrêmement poétique et propre à l’imaginaire de Gauvreau pouvant être analysé et reçu de mille et une façons différentes. Par exemple, les possibilités sont infinies quant à l’interprétation de cette réplique : « PRESCOTT DIEBULIAN (par gestes) – !!!!!!!!! » (p.15) Par ailleurs, comment faire pour représenter cette didascalie? « Ernest Gogott tire sur une courroie qui se perd dans une muraille, il sort un squelette de la muraille lequel devient un corps gelé – puis un monsieur souriant qui tend sa carte d’invitation. C’est Jasmin Liblua. » (p.27) Ou encore celle-ci : « Quatre septièmes d’un mur lézardé verdâtre passe majestueusement à cinq pieds derrière les personnages et se heurte à Jasmin Liblua sur lequel il prend la forme d’une sauterelle de mer et Ernest Gogott passe à travers ce mur transformé qui s’éloigne en très longue chevelure verte jusqu’à disparaître. » (p.50) Et ne voilà que deux exemples parmi une centaine! De surcroît, la pièce regorge de références, de double-sens, même triple-sens référentiel. Gauvreau, par l’entremise de ses personnages, semble faire un gigantesque tableau de mots où chaque coup de pinceau correspond à un artiste (peintre, écrivain, chanteur, philosophe, etc.) ou à une oeuvre (toutes disciplines confondues) à qui il rend hommage.

Le défi est encore plus grand de vouloir mettre en scène cette pièce en une installation technologique interactive plutôt qu’avec le médium pour lequel elle avait été créée. Et voici exactement l’entreprise dans laquelle se plonge l’équipe d’AREA! 

Timeline d’analyse du texte dramatique

Un peu plus sur Gauvreau

Claude Gauvreau était un poète et dramaturge québécois, né à Montréal en 1925. Il a fait ses études classiques au Collège Sainte-Marie et a étudié la philosophe à l’Université de Montréal. Grâce à son frère Pierre, peintre et étudiant aux Beaux-arts, il a fait la rencontre de Borduas, événement décisif pour sa carrière et sa vie. Il a participé à plusieurs spectacles de poésie, développé son langage singulier qu’il nomma l’exploréen et est devenu un fier partisan du mouvement automatiste. En 1948, il signait le Refus Global et composa plusieurs oeuvre inspirées de sa muse, la comédienne Muriel Guilbaut, dont sa pièce Bien être. Le suicide de celle-ci l’a énormément affecté et, dès lors, il a passé plusieurs séjours à l’hôpital psychiatrique Saint-Jean-de-Dieu. Entre ses nombreux internements, il a écrit son roman sur la vie de la comédienne, intitulée Beauté baroque, et ses pièces les plus connues, dont La Charge de l’orignal épormyable qui fut montée par la troupe Zéro en 1970 et au TNM en 1974. Gauvreau est décédé de manière tragique, lui aussi, par le suicide en 1971. Son oeuvre maîtresse, Les Oranges sont vertes, n’est jouée qu’en 1972, le faisant enfin découvrir par le public. La plupart de ses œuvres complètes ne sont publiés que quelques années après sa mort.

Glossaire

Cette pièce mystérieuse et sublime de Claude Gauvreau, qui ne se laisse pas approcher aisément, regorge de mots rares, de néologismes, de noms propres de lieux et de personnes célèbres, des artistes-peintres et des auteurs particulièrement. Jusqu’à maintenant, personne n’avait osé réaliser le détail complet de tous ces mots. C’est le travail que nous nous sommes proposés et ce document en est le résultat.

Pour ce glossaire, nous avons laissé de côté tous les mots facilement définissables, encore utilisés dans le langage courant de « notre époque » (2016) et qui n’ont aucune équivoque ou définition rare. Pour les autres, dont la définition ne venait pas aisément ou dont l’une des définitions suggérées ajoutaient quelques éléments aux sens proposés par la pièce, nous les avons regroupés en trois grands groupes :

  1. Les noms propres connus et reconnus par une autorité respectée. Dans ce premier groupe de mots, on retrouve tous ceux cités dans la pièce qui font référence à une personne, un groupe, un mouvement artistique, un lieu, une rue célèbre, etc., qui a existé, existaient en 1958 (et souvent existent encore aujourd’hui).
  1. Les noms communs, adjectifs, verbes, interjections, etc., reconnus par un dictionnaire respecté, le québécois Antidote de préférence, mais aussi plusieurs autres.
  1. Les néologismes, dont certains mots que l’on pourrait qualifier d’exploréens, les noms communs utilisés comme noms propres, et inversement, les noms propres dont on n’a pas trouvé les références.

Il est à noter que ce travail est, dans l’état, le plus complet possible, mais il pourrait s’ajouter des mots et des définitions, quelques précisions ; bref, des mises à jour dans les semaines qui viennent.

Un merci très spécial à Yannick Legault pour cet accomplissement généreux et des plus utiles.

Pour avoir accès au glossaire, cliquez sur le lien ci-dessous :

Glossaire

 ÉTAPES DE RECHERCHE

Phase 1 : Printemps-Automne 2016

La première étape de travail a servi à conceptualiser le logiciel e-theatre grâce à une analyse dramaturgique de la pièce :

– analyse de la structure de la pièce avec les principaux éléments actifs (personnages, lieux, récurrences conceptuelles) et création d’un outil de type timeline afin de comprendre d’un simple coup d’œil les enjeux structurels

– création d’un index dynamiques avec plus de 500 références à des mots inusités, à des néologismes ou à des références de personnages existants, de lieux, de moments historiques

– répertorier les situations d’actions, les didascalies, les éléments scénographiques et sonores servant d’assise à la conception audiovisuelle du projet.

Nous avons aussi conçu et réalisé un premier dispositif lié à la table et l’intégration technique de base servant à la projection visuelle (mapping). Au point de vue sonore, chacune des voix des personnages a été générée par un dispositif de voix synthétique (Text to Speech), ce qui a permis de créer une première séquence afin de valider le fonctionnement du système complexe (régie numérique multi-système, modules robotiques du castelet…).

Phase 2 : Hiver 2017

Pour la deuxième étape, deux modules dramaturgiques ont été créés à partir des récurrences thématiques et expérimentés devant public en ayant recours à l’ensemble des éléments présents sur la table : projections lumineuses et d’images, éléments mécaniques (castelet électronique et tête robotisée de l’hôte), caméras robotisées, texte lu avec voix synthétiques… Pour la plateforme logicielle e-theatre, nous avons commencé à intégrer des références visuelles issues de la conception scénographique et de mise en scène (identification des points de focus potentiels…). Première présentation devant public en février 2017.

Phase 3 : Hiver 2018

Pour la troisième étape, on a tout remis à zéro (médias, dramaturgie) pour expérimenter un nouveau processus de création par couches. Au lieu de procéder de manière linéaire comme à l’étape 2, nous avons rapidement effectué un premier jet couvrant l’ensemble de trois modules dramatiques. Puis, nous les avons peaufinés en fonction du temps imparti et des ressources présentes (méthode par prototypage) en mettant de côté notre plateforme logicielle pour expérimenter d’autres moyens d’écriture complexe qui pourront par la suite être implémentés. Un nouveau logiciel de contrôle a été fabriqué par nos partenaires scientifiques pour le déplacement d’éléments mécaniques liés à l’étagère à câbles. Un certain soin a été apporté à l’environnement scénographique afin de créer une expérience immersive où le spectateur est au cœur de l’action scénique. Cette dernière étape du projet a été présentée devant public à trois différentes occasions lors du Festival de théâtre de l’université Laval (FTUL).

Présentations avec le Collective Dans Ta Tête (DDT

Du 24 mai au 9 juin 2018

Carrefour international de théâtre

Résidence au Studio d’essai de Méduse (financement : programme de soutien à la création de l’Université Laval)

Le Collectif DTT s’engage dans un premier laboratoire de création pour un spectacle inspiré du téléthéâtre cosmique Rose enfer des animaux, de Claude Gauvreau (1958). Cette oeuvre installative et interactive invite le spectateur à devenir un personnage animal et à prendre part à un banquet surréaliste pendant lequel les personnages se gaveront de mots et de poésie exploréenne dans le seul but de faire revivre toute la splendeur du mouvement automatiste et l’imaginaire de Gauvreau. Cette grande table festive est un véritable chantier technologique : robotique, video mapping, caméra live, câbles motorisés, etc. au service d’une expérience déjantée qui s’amuse avec la sensorialité des spectateurs et leurs perceptions. 

Pour cette résidence, les voix traitées de l’ensemble des 9 personnages sont transmises pour la première fois par un performeur qui crée également en direct l’environnement sonore du spectacle. De plus, un gradin attenant à la table permet à une vingtaine de spectateurs de prendre un certain recul afin d’assister à la globalité de l’expérience festive. 

12 et 13 septembre 2019

PHOS

Laboratoire public tenu au CDRIN du Cégep de Matane (financement : Première Ovations – multidisciplinaire)

Pour le dernier laboratoire exploratoire, le collectif expérimente le mode tournée en redessinant complètement la table en plexiglass afin d’y insérer les moniteurs vidéo qui agissent comme nourriture visuelle à chacun des spectateurs-personnage et qui permettent également de leur d’expérimenter de nouvelles consignes de jeu. On améliore également le dispositif sonore pour le rendu indidualisé de chacune des voix transmises en direct par le performeur qui cette fois se trouve intégré au dispositf scénique en surplomb de la table. Une nouvelle interface visuelle (écran de 55 po.) retransmet pour le gradin des images captées par une caméra mobile placée au-dessus de la table (valet robotisé). Une partie des projections mappées sur la table est traitée en direct par une performeure vidéo tout comme l’environnement sonore spatialisé. 

ÉQUIPE

Équipe – phases de recherche-création (2016-2018)

Robert Faguy (concepteur et directeur du projet) : Phase 1-2-3

Ludovic Fouquet (coordination et exploration) – professionnel de recherche : Phase 1-2

Arielle Cloutier (assistance à la dramaturgie) – maitrise LAS : Phase 1-2-3

Keven Dubois (direction technique, programmation et projection) – professionnel de recherche : Phase 1-2-3

Marc-Philippe Parent (conception du logiciel e-théâtre et programmation) – doctorat sur mesure en théâtre et génie logiciel : Phase 1-2

Yannick Legault (conseiller dramaturgique) – prof? : Phase 1

Chantal Prudhomme (assistante à la conception de l’outil logiciel) – doctorat LAS : Phase 1

Paula Rojas Amador (intégration scénographique et conception vidéo) – doctorat LAS : Phases 1-2-3

Roberto Gomes Barbosa (environnement sonore) – doctorat LAS : Phase 2-3

Natalia Soldera (intégration et conception vidéo) – doctorat LAS : Phase 3

Gaspard Philippe (assistant aux voix synthèse) – Bac en théâtre : Phase 1

Maxime Milhorat Gusteau (intégration voix synthèse) – maitrise LAS : Phase 1-2

Hugo Hepp (programmation et environnement sonore) – stagiaire du cégep Limoilou et étudiant au certificat en audio-numérique : Phase 2-3

Jules Radin (assistance au mapping vidéo) – Bac en théâtre : Phase 2

Émile Beauchemin (assistance à l’intégration interactive) – étudiant à la maitrise LAS : phase 2

Équipe du LVSN et du Laboratoire de robotique – Sylvain Comtois, Denis Ouellet (conception et réalisation du logiciel de contrôle du mécanisme à cables) – professsionnels de recherche : phase 2-3

Virginie Leclerc (scénographie) – contrat artiste : phase 3

Philippe Lessard-Drolet (conseiller à l’environnement interactif) – contrat artiste : phase 2

Viviane Rin (masques) – contrat artiste : phase 3

Guillaume Tardif (construction table) – contrat artiste : phase 1

Harold Boivin (soutien technique) – Technicien : Phase 1-2-3

Thomas Langlois (dramaturgie) – doctorat LAS : phase 3

Équipe – Présentations Collectif DTT 

Carrefour international de théâtre de Québec – CITQ (2018)

Événement PHOS – Matane (2019)

Arielle Cloutier (dramaturgie – direction –  vidéo) : CITQ – PHOS

Thomas Langlois (dramaturgie – direction – performeur) : CITQ – PHOS

Robert Faguy (soutien à la conception et à la réalisation ) : CITQ – PHOS

Keven Dubois (direction technique – conception vidéo) : CITQ – PHOS

Julie Meschine (Masque et accessoire) : CITQ – PHOS

Hugo Hepp (conception sonore et assistance technique) : CITQ

Natalia Soldera (conception vidéo) : CITQ

Claudelle Houde Labrecque (scénographie) : CITQ

David Mendoza : (scénographie) : PHOS

Michael Larraguibel (régie et assistance technique) : PHOS

SYSTÈME ET DISPOSITIF TECHNIQUE